Lesina
"— Hvar, dit le commandant du Yougoslavia, est la Madère dalmate. […] qui nous confiera le souvenir d'une terre africaine sous les palmiers, les orangers, les figuiers, les caroubiers, et, à d'autres endroits, tout simplement, sous le roc pelé et la maigre brousse. […].
Elle abonde en lions, elle aussi. Ses demeures patriciennes ont beau tomber en ruines, elles n'en portent pas moins dans leurs ogives et leurs fenêtres biforées la grande signature de Venise. Faut-it parler des trois campaniles, de la loggia, du vieil arsenal? On se doute que les doges ne bâtissaient pas autrement ici que dans leurs autres possessions dalmates. Ce qu'il y a sans doute de plus frappant, dans cette petite ville de deux milles âmes, c'est le nombre extraordinaire de tableaux de maîtres que recèlent ses églises: Palma de Jeune, Tiepolo, Titien sont nommés ici couramment — sans doute un peu plus qu'il ne serait tout à fait légitime — par les bedeaux et par le franciscan qui fait visiter son monastère. Les bateaux construits à puissant tapage par la Sérénissime dans son arsenal de Hvar ont cessé depuis longtemps de tenter les profits marins, mais les bois et les toiles qu'anoblirent ses peintres sont là, en exemples durables de ce que Venise a produit de meilleur et de plus pacifique" (pp. 60-63).